Commémoration d ‘Achoura

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La tragédie de Karbalâ' est traditionnellement commémorée durant treize nuits avec d'un côté l’évocation des leçons tirées de Karbalâ' sur le plan des croyances et de la morale, telles que l’Ordonnance du Bien et l’Interdiction du Mal, le Combat Intérieur, l’Unicité et la Soumission à Dieu, le Rôle de la Femme dans l’Islam, le Repentir (etc) et de l'autre, les lignes générales de l'évènement historique. Le récit de la tragédie de Karbalâ’ dans son intégralité est réservé pour le dixième jour, le jour de 'Ashûrâ' avec les Ziyârât à l'Imam Hussein(p) et à ceux qui étaient avec lui à Karbalâ'.

La révolution de l'Imam Hussein(p), répond à l'amour profond présent en chacun d’entre nous pour la Liberté, la Vérité, la Justice et la Dignité. Elle a eu un écho jusqu'en Chine. Elle a fait dire à Gandhî, le célèbre philosophe et homme politique indien, connu pour ses positions antibritanniques : « J'ai appris de Hussein comment être opprimé et remporter la victoire ».

Commémorer le martyre de Karbala', est prescrit par la religion immuable de la nature divine

Dans cette Religion immuable, tout être qui incarne une de ces perfections est, dans cette mesure même, un "temple de la Perfection"; tout endroit où l'une de ces perfections fut réalisée est, dans cette mesure même, un lieu d'épiphanie et de manifestation de la divine Perfection; tout moment où s'est accomplie une de ces perfections est, dans cette mesure même, une Nuit de Valeur dans laquelle est descendue la Perfection divine et l'un des Jours de Dieu qu'il convient de commémorer:

‹‹Fais sortir ton peuple des ténèbres vers la lumière et rappelle-leur les Jours de Dieu: il y a en cela des signes pour tout [homme] plein de patience et de reconnaissance.››

(Cor. s.14 v.5)

Or, le jour de 'Achoura reunie , tant de qualités humaines, tant de vertus morales et tant de perfections réunies en un seul lieu . Il suffit de lire le récit des événements de cette journée grandiose, des jours qui la précédèrent et de ceux qui la suivirent pour prendre conscience qu'aucun autre jour ne vit, concentré en un même lieu, tant de grandeur humaine et tant de noblesse d'âme.

En ce jour de 'Achoura, en cette terre de Karbala, le bien était si juste, si pur et si parfait, et le mal si pervers, si inique et si noir que même un cœur aveugle ne peut qu'y voir bien clair et trouver son chemin, seuls les cœurs inhumains, morts ou carbonisés demeurant insensibles à l'appel de ce Jour de Dieu.

"Il n'est point de jour comme ton jour, ô père du serviteur de Dieu (lâ yaoma ka-yaomik yâ Abâ 'Abdallâh)."(Hadith de l'Imam Hassan al-Modjtabâ, que la Paix soit avec lui)

Depuis que le monde est monde, chaque fois qu'un être humain fait une action remarquable ou se distingue éminemment par quelque vertu, les autres hommes font en sorte que ce comportement puisse servir d'exemple édifiant et de modèle pour les générations futures. Ces personnalités modèles et leurs actions exemplaires devinrent ainsi les parangons de récits religieux, mythiques ou légendaires, ou bien furent immortalisés par des arts tels que la poésie, des sciences telles que l'histoire et des pratiques telles que les diverses commémorations religieuses et civiles.

Les jours de notre histoire et les lieux de notre planète sont ainsi ponctués de "jalons" temporels et géographiques qui sont autant de "repères" (shaeâ'ir) sur la voie de l'humanité parfaite, "repères" de la religion immuable de Dieu et de la divine nature humaine: tel jour ou tel endroit a vu tel acte de bravoure, tel autre jour ou lieu fut témoin de telle abnégation, tel troisième date ou terre fut marquée par tel acte de miséricorde… ou bien, au contraire, tel jour funeste ou tel endroit fut entaché par telle vilénie, telle trahison, telle fourberie…

Ces "repères de Dieu" (shaeâ'ir Allah) peuvent alors se trouver intégrés à des rites prescrits,

comme c'est le cas pour les Djamârât que l'on doit lapider dans les rites du Hadj, par exemple, et qui ne sont autres que les lieux où le maudit Iblîs tenta Adam et Abraham et où ils le lapidèrent; ou encore pour les monts de Safâ' et Marwa dont le Coran énonce qu'ils font partie des "repères de Dieu" min shaeâ'ir Allah.

"Rappelle-leur les Jours de Dieu: il y a en cela des signes pour tout [homme] plein de patience et de reconnaissance. (Cor. s.14v.5), ou encore:

“Quant à qui vénère les repères de Dieu, cela relève en vérité de la vertu des cœurs.” (Cor. s.22v.32)

Or, il n'y eut depuis que le monde est monde aucun lieu autre que Karbala ni moment autre que 'Achoura où autant de vertus se manifestèrent de manière aussi concentrée et aussi intense en face d'autant d'iniquités avec autant d'intensité, ce qui fait que la commémoration du martyre de Karbala occupe dans la sharî'a de la divine intelligence et la sonna des gens doués de coeurs intelligents (oulou l-albâb) une place unique .

Le verset de Mawaddah : « Dis : je ne vous demande aucun salaire pour cela si ce n`est votre amour envers les proches »(al-choura, 42 : 23.ainsi selon al-zamakh-chari dans son tafsir al-kachaf : on demanda au prophete (psl) qui sont les proches dans ce verset ? Il répondit : Ali, Fatimah et leur fils.

C'est ainsi que les fidèles des Gens de la Demeure prophétique, par qui nous vient la Paix, se réjouissent de toute joie dont se réjouirent ou se réjouissent leurs bien-aimés et s'attristent de toute affliction qui les touche: les anniversaires du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, de l'Imam 'Ali, de Fatima, de Hassan, de Hossein et des autres membres de la Sainte Famille mettent leurs cœurs en fête. De même tressaillons-nous de joie au souvenir de toute grâce dont Dieu comble Ses Proches Amis et tout particulièrement des victoires contre les ennemis de Dieu, depuis les triomphes héroïques des temps de la Révélation jusqu'à celles dont Dieu gratifie aujourd'hui certains de leurs fidèles.

Au contraire, les épreuves et les deuils qui touchèrent et touchent encore les Proches Amis de Dieu nous déchirent le cœur, qu'il s'agisse de la méchanceté des Mekkois envers le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, de la perte de son épouse tant aimée Khadîdja, de ses oncles Abou Tâlib et Hamza, de ses enfants et de tant d'autres de ses proches et compagnons; qu'il s'agisse aussi des déviations que les musulmans firent subir à l'islam, à l'époque omeyyade; qu'il s'agisse encore de la situation de l'islam et des musulmans de nos jours, qui ne peut que faire saigner le coeur du noble Messager et de ses proches, après tout ce qu'ils ont enduré pour nous faire connaître les voies du bonheur et de la félicité en ce monde et dans l'autre…

L'intensité de la douleur ou de la joie des fidèles épris d'amour dépend bien évidemment tout d'abord de la sincérité de leur amour et de leur communion, mais elle dépend aussi de l'importance de l'événement source de joie ou de chagrin. Or, il n'y eut depuis que le monde est monde aucun lieu autre que Karbala ni moment autre que 'Achoura où autant de malheurs s'abattirent de manière si concentrée et si injustement sur des êtres aussi parfaitement innocents, sans compter que de multiples aspects viennent encore, tel du sel sur une plaie, vivifier la douleur de cette tragédie (par exemple, le fait que les dirigeants de ce crime se prétendaient pieux musulmans et qu'ils sont pour certains toujours reconnus comme tels par nombre de musulmans, où encore le fait qu` ils ont tout fait et continuent de tout faire pour effacer le souvenir de cette tragédie).

On voit donc que, loin d'être une "innovation" comme le prétendent certains inquisiteurs au cœur aussi vide d'amour que dénué d'intelligence, la commémoration du martyre de Karbala est au coeur du coeur de la religion immuable de Dieu . Prescrite aussi bien par la sharî'a de la divine intelligence que par la sonna de l'amour divin, cette commémoration est en fait si fondamentale pour la religion de Dieu que l'on peut sans hésiter affirmer que c'est grâce au martyre de Karbala et à sa commémoration que l'islam est toujours vivant.

Oui, c'est bien grâce au martyre de Karbala et à sa commémoration que l'islam est toujours vivant, et c'est d'ailleurs là un des sens du fameux hadith gravé à l'entrée de la mosquée de Sayyidnâ Hossein au Caire: "Al Hossayn est de moi et je suis Al Hossein" (Al Hossein min-nî wa anâ min Al Hossein ): le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens représente ici tout l'islam et Al Hossein représente le djihâd , et en particulier le djihâd ultime qu'il mena à Karbala le jour de 'Achoura, un djihâd incluant le sacrifice total de tout ce qu'il pouvait avoir à sacrifier, sans rien compter ni épargner, pas même son innocent nouveau-né.

"Si la religion de mon grand-père ne peut demeurer droite qu'au prix de mon assassinat, ô sabres, ôtez-moi donc la vie", clama Hossein à Karbala Sans ce sacrifice suprême, l'islam que nous connaîtrions aujourd'hui serait l'islam de Yazîd ou même pire encore, un islam qui n'aurait pas plus à voir avec l'islam de Mohammad, Dieu le bénisse lui et les siens, que le judaïsme actuel n'a à voir avec la religion de Moïse ou les églises chrétiennes avec la religion du Christ. Mais le sang versé à Karbala secoua la communauté musulmane tout entière de sa torpeur, même si elle ne tarda pas bien longtemps pour rentrer en hibernation.

Mais la chose était faite: l'arbre de l'islam, planté par Mohammad, Dieu le bénisse lui et les siens, était maintenant irrigué par le sang de Hossein et des siens, qui lui sauva la vie.

L'islam doit ainsi sa naissance au Prophète Mohammad, Dieu le bénisse lui et les siens, mais il doit sa survie au djihâd et au sacrifice de Hossein et des siens, à Karbala, le jour de

ces commémorations qui maintinrent vivant à travers l'histoire et continueront si Dieu veut de maintenir vivant l'esprit du djihâd et du sacrifice dans la voie de Dieu et de l'humanité véritable.

Les adeptes de Ahlul-Bayte ont célébré tout au long de leur histoire islamique les cérémonies de deuil pour les martyrs de Karbala et en suivant l'exemple du seigneur des martyrs (AS) et en tirant leçon de l'événement de Karbala, la luté contre la tyrannie des gouverneurs et des oppresseurs. Une telle idéologie et pensée a fait du chiisme un élément révolutionnaire qui lutte contre la tyrannie et qui ne laisse aucun repos aux oppresseurs. Un coup d'œil sur les mouvements chiites au cours de l'histoire du chiisme montre que la leçon tirée du soulèvement d'Achoura représente le moteur de tous ces mouvements. Dans le mouvement islamique de l'Iran, guidé par l'imam Khomeiny (s), tout comme tous les autres mouvements à caractère religieux lancés par les Iraniens, le soulèvement d'Achoura et la leçon tirée de l'imam Hussein jouent un rôle essentiel et important et constituent le principal facteur de la victoire, de la survie et du progrès de la révolution islamique. Hussein (AS) est la lampe de l'orientation et le bateau du salut. Le visiteur de son mausolée pur est largement récompensé par le Seigneur.

Pour terminer,voici l`extrait du testament politico spirituel de l'Imam Khomeiny, Dieu ait son âme :

Je conjure et supplie instamment les peuples musulmans de s’attacher comme il se doit, de tout leur coeur et de toute leur âme, en faisant don d’eux-mêmes et des êtres qui leur sont chers,au Prophete(psl) et aux Saints Imams de la famille du Prophète (p) et à la culture politique, sociale, économique et militaire de ces illustres guides de l’humanité.

Qu’ils ne négligent jamais les cérémonies de deuil du Seigneur des opprimés et Prince des martyrs, Sa Seigneurie Abû ‘Abd Allah al Hossein, que les bénédictions de Dieu, des Prophètes, des Anges et des hommes de bien soient abondamment répandues sur son noble et vaillant esprit.

Qu’ils sachent que l’ordre donné par les Imams, que la Paix soit avec eux, de commémorer cette épopée historique de l’islam ainsi que les imprécations et malédictions à l’encontre des oppresseurs des Gens de la Demeure sont la clameur héroïque des peuples face aux gouvernants iniques tout au long de l’histoire [et] pour l’éternité.

Sachez que les malédictions, imprécations et clameurs en raison de l’iniquité des Omeyyade, que la malédiction divine soit sur eux, alors qu’ils ont disparu et pris le chemin de l’Enfer, est une clameur à la face des oppresseurs du monde entier, et maintenir cette clameur vivante détruit l’oppression.

Et il faut ponctuer fortement et sans relâche les lamentations et les poèmes de deuil ou de louange au Prophete (psl) et des Imams de Vérité, que la Paix soit avec eux, par des rappels des calamités et iniquités des oppresseurs de toute époque et de tout lieu : en ce siècle, siècle de l’oppression du monde musulman par l’Amérique, l’Union soviétique…

Nous devons tous savoir que le facteur d’unité entre les musulmans, ce sont ces cérémonies [à caractère] politiques qui préservent l’identité communautaire des musulmans, et en particulier des fidèles des douze Imams, que les Bénédictions et la Paix divines soient avec eux.

(Imam Khomeiny, Testament Politico spirituel)

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